Entreprise ardue que de nommer la Nuit
Entreprise ardue que de nommer la Nuit
Entreprise ardue que de nommer la Nuit car elle est cette entité qui réfute matière au profit d’une batterie de parfums et de sons. Germe informel, elle tente de s’implanter, chair tendre au plus profond mais tégument aussi coriace que ce vieux monde à réinventer.
J’aime à évoquer les ronces tapies dans son âme et mes efforts pour leur échapper. Opiniâtres elles s’imposent autant qu’elles souhaitent s’effacer.
Je n’inviterai pas l’aurore secourable car trop souvent fêlée. La nuit aura loisir de s’adonner à tout caprice qu’il lui plaira de fomenter. Le temps s’appliquera à l’apprivoiser.
Évoquer la nuit, c’est célébrer le doute, tous les doutes, les aider à s’incarner, neuves d’étoiles, à la pointe d’un rocher abrupt. On débute l’escalade de nos fausses convictions sans cesse à éradiquer.
Dans son tremblement de peau, le poème s’invite à la nuit. D’un astre l’autre, il consent à s’abandonner. Si longue cette longue nuit des mots, comment la délivrer de l’angoisse ? Comment la formuler autrement que par sa douceâtre clarté ?
Jeannine Dion-Guérin, Extrait de L’Écho des nuits, Editinter.
Egalement reproduit dans la revue L'Ouvre Boîte à Poèmes, n° 93, sept. 2012, p. 21.
Tous mes remerciements à Jeannine
(mise en ligne de cette page : 17.11.2012)